Ces parents qui répètent...
- Décembre 2018
- par Jean-Luc ROBERT
- Psychologue à LezAPe
I NE PAS RéPéTER :
Voici l'histoire de Maud âgée de 8
ans :
1- Les parents : Lors des prises en
charge LezAPe (LezAteliersParents-enfants), revient de
façon récurrente cette consigne donnée aux parents : «
Ne pas répéter », qu’ils peinent pour la plupart à
respecter.
2- L’enfant : a quant à lui la consigne de ne plus faire répéter ou : « d’obéir dès la première demande ».
3- Le psychologue : dans son rôle, essaie de leur faire réaliser que leurs demandes sont répétées un certain nombre de fois avant que l'enfant daigne réagir.
Conditionnés qu'ils sont, beaucoup
ont même tendance à anticiper une absence de réaction,
adressant d'emblée leur demande en 3 exemplaires
consécutifs : "Maud, viens dire au revoir... (2
secondes)... S'il te plaît Maud, le Monsieur s'en va...
(2 secondes)... S'il te plaît Maud tu viens?..."
Evidemment, Maud ne vient pas et le parent ne se rend
absolument pas compte qu'il a déjà répété 3 fois sa
demande à 2 secondes d'intervalle comme l'automate
désigné qu'il est. Finalement, Maud daignera pointer le
bout de son nez après que le parent ait fini par se
déplacer, comme s'il était toujours nécessaire d'ajouer
l'image au son.
Maud estime probablement que le rôle de ce parent est de
venir la sortir de son jeu ou de ses pensées, tout comme
elle estime qu'il faut lui répondre immédiatement
lorsqu'elle interrompt brutalement une conversation
entre deux adultes. A part cela, on peut dire qu'elle
est charmante et qu'elle a presque l'air inoffensive
avec ses petites joues encore dodues.
Les MENACES à répétition = mauvaise solution ?
Pédagogues, nous leur expliquons
pour quelles raisons il est contreproductif de répéter,
de MENACER et de crier, pour une enfant qui est bien en
mesure d'entendre dès la première demande. Il est en
effet indispensable que le parent comprenne la raison de
cette consigne, car il sera d'autant plus motivé pour
l'appliquer si elle fait sens pour lui.
4 - Les questions à poser :
La première question que ce
parent doit donc se poser est :
4a- Qu'est-ce qui peut expliquer cette
surdité sélective chez mon enfant qui
m'a rendu.e esclave de la répétition (=fonction de ce
comportement)?
Nous leur demandons ensuite d'être autocritique
:
4b- Est-ce que je parviens
OBJECTIVEMENT à appliquer la consigne "Ne pas répéter"
demandée par le psychologue? Beaucoup le pensent et
prétendent ne plus répéter. Or il faut bien le dire,
lorsque l'on creuse un peu, on se rend compte que
l'évaluation positive de cet objectif est faite au
pifomètre.
4c- Suis-je sûr de ne pas encourager sa
désobéissance par mes répétitions? Ou, autrement dit :
Parler d'un ton sévère avec ma grosse voix, le menacer
une première fois (compter 1... le pouce levé, 2...
l'index levé...), puis réitérer la menace deux minutes
après, bref le menacer jusqu'à ce qu'il finisse par
prendre peur (en apparence), n'est-il pas au contraire
renforcer (R+) cette attitude toute-puissante chez lui
et finalement perdre en autorité?
4d- Que va-t-il donc se passer si le
parent ne répète pas?
L'enfant n'obéira pas et le parent considérera qu'il n'a
aucune autorité sur son enfant. Un bras de fer
s'engagera alors entre le parent frustré et son enfant
pour avoir le dernier mot, situant les deux
acteurs au même niveau.
Les parents souhaitent toujours se faire obéir
IMMEDIATEMENT, car pour eux, leur autorité parentale ne
peut passer que par cette obéissance immédiate. Le
problème est que pour arriver à ce résultat, il faut
accepter d'être patient et sur le moyen terme donc, accepter
que l'obéissance ne soit pas immédiate. Il
n'y a pas le feu! Car l'enfant triomphe sur l'instant
mais pour combien de temps? Il n'a pas obéi, le parent
n'a pas répété, la chose n'est pas faite. Mais que
va-t-il se passer ensuite?
II L'APPRENTISSAGE PAR LA PUNITION : Etape fondamentale!
Ensuite, viendra le temps de l'apprentissage de l'obéissance, lors de cette 4ème étape fondamentale qu'est la punition négative : Procédure par laquelle la probabilité d'apparition de fréquence d'un comportement tend à diminuer suite au retrait d'un stimulus appétitif : retrait d'un privilège, d'une chose agréable...
1- Quand punir et comment?
> On doit impérativement
attendre que l'enfant émette une demande ou qu'il
utilise un.e objet/activité préféré.e de son propre chef
pour le.a lui refuser;
> On doit pouvoir appliquer cette punition après un
long délai (si l'enfant met du temps avant d'être en
position d'être puni);
> On ne doit observer aucune récompense entre le
moment qui suit la désobéissance et la punition;
> On doit appliquer cette punition sans montrer
d'énervement et un temps suffisamment long.
2- Point essentiel
Car le parent qui se fait mener par le bout du nez finit par oublier une chose essentielle que l'enfant lui a fait oublier : Ce dernier est entièrement dépendant de lui.
Contenu de la vidéo :
Scène
1 : EDOUARD âgé de 7 ans :
Demande/menace 1 : "Edouard, je compte
jusqu'à 10, si ton pyjama n'est pas mis en s'en va se
coucher tout nu.
Réponse 1 :
NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN!!!
Demande 2 : 1...2..
Réponse 2 :
Laisse-moi tran, fous-moi la paix!
LA PRESSION MONTE...
Demande 3 : 3...10. Parfait je veux le
pyjama.
Réponse 3 :
NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN!!! NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN!!!
- Maman prend le pyjama car la consigne était de mettre
le pyjama tout seul et tu ne l'as pas fait.
- NAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAN!!! Je ne veux pas dormir tout
nu.
Demande 4 : Je te laisse une dernière
chance.
Réponse 4 : Arrête
de compter! (car le comptage met Edouard sous pression.
Il évacue cette pression en hurlant.)
- D'accord je ne compterai plus, mais tu mets ton pyjama
IMMEDIATEMENT (Pression ++).
- Maintenant va-t'en!
- Non je reste ici...
- Arrête de me regarder. (Eduard ne veut pas montrer
qu'il a obéi en mettant son pyjama en l'absence de sa
mère, mais cette dernière a le réflexe de continuer le
bras de fer. Elle semble vouloir qu'il obéisse sous ses
yeux. Ou peut-être ne lui fait-elle pas confiance?)
Demande 5 : Je reste ici, et tu mets
ton pyjama MAINTENANT.
Réponse 5 :
Redoublement des cris : Laisse moi tranquille.
- Edouard ?
- Va-t'eeen! Laisse-moi me calmeeeer!
CETTE PHRASE FAIT MOUCHE.
SILENCE. La mère semble réaliser qu'Edouard est sous
pression et qu'insister encore ne mènerait nulle part.
- Je vais te laisser te calmer et je vais revenir dans 5
minutes.
...
> Qu'est-ce qui peut faire qu'il soit si difficile pour un parent d'appliquer simplement cette punition (ignorer sa désobéissance, puis attendre une demande pour la refuser) ? En général, les parents qui ont du mal à l'appliquer passent par tant de menaces pseudo-dissuasives et renforçantes, que l'enfant ne peut faire autrement que de poursuivre le bras de fer.
Cette scène est par conséquent pour nous un moment important qui doit être revisité en atelier. Il s’agit je le répète, d’inciter le parent à ne pas répéter sa consigne, et à prendre le temps d’appliquer sereinement une punition pédagogique qui nous en sommes convaincus, portera ses fruits sur le long terme.
Mots-clés : #menaces_à_répétition, #punition_négative,
#renforcement_positif, #conditionnement,
#autorité_parentale
Auteur du livre : Ma vérité sur l'autisme, Jean-Luc ROBERT, N° ADELI : 779301076, consacre essentiellement sa carrière à l'étude et au traitement des troubles du comportement des enfants, notamment des autistes.