Les
limites de l'éducation positive 2
- Nov. 2021
- par Jean-Luc ROBERT
- Psychologue à LezAPe
>> EXTRAIT GRATUIT du livre ICI <<
A lire aussi : https://www.lezape.fr/articles/le-retour-de-l-autorite-est-il-possible.html
Et le comportement?
Avec
cet apprentissage modelable
et sur-mesure que l'on propose désormais aux enfants, va
une baisse des exigences incontestable, qui explique
sans doute qu'un diplômé moyen du BAC d'aujourd'hui ait
le niveau d'un élève de 3ème d'hier. Parfois même,
certains bacheliers (les plus en difficulté) ont le
niveau d'un élève de 6ème d'hier (dans de nombreuses
matières dont l'orthographe bien sûr). Mais ô miracle,
ils obtiennent ma foi le précieux sésame qui leur permet
d'envisager des études supérieures qui ne seront pas
plus brillantes.
Symboliquement,
on peut aussi considérer ce baccalauréat comme un
passage initiatique validant un bagage d'instruction
supposé suffisant pour évoluer dans une vie d'adulte
(travailler, mais aussi instruire à son tour,
transmettre).
Inutile de s'étendre sur l'énorme
mensonge dont il s'agit en réalité, et sur les raisons
politiques qui ont conduit à cette mascarade en France.
Ce qui nous intéresse ici, c'est de mettre en lumière
qu'avec ce niveau de l'instruction qui a baissé, on note
aussi un délitement de l'éducation. Il s'agit de ne plus imposer une
autorité que l'on estimerait illégitime, et de tout
négocier. Et l'on pourrait dire sans exagération, que si
tout devient négociable, tout devient alors contestable.
L'enseignant qui était le seul maître à bord pour
employer une métaphore illustrant parfaitement le
#PASDEVAGUE lancé par les enseignants en 2018,
est désormais ballotté. Il subit la houle
d'élèves sans scrupules qui ne craignent plus une
sanction qui la plupart de temps ne viendra pas.
Cette
chute vertigineuse du niveau des exigences dans le
domaine scolaire entre-t-elle donc en résonance avec la
baisse des exigences en matière d'éducation? Je répondrais en affirmant que la
discipline exigée par un professeur qui doit tenir sa
classe pour permettre à chacun de faire des
apprentissages est aujourd'hui mise à mal, précisément
parce que ces nouveaux élèves n'ont plus le même respect
pour les adultes, qu'il s'agisse de leurs parents, de
leurs éducateurs, ou de leurs enseignants. Un professeur
qui voudrait établir aujourd'hui un tel barême des
punitions dans une classe élémentaire serait jugé
complètement en décalage avec son époque. Et il ne fait
aucun doute que ses jeunes élèves le lui feraient
rapidement savoir. Elèves mécontents, Associations,
remontrances des parents..., le directeur de
l'établissement ne pourrait que céder face à la marée de
reproches qui le submergerait.
Une discipline positive?
Car
aujourd'hui voyez-vous, il est question d'appliquer une "discipline
positive", ou "éducation bienveillante", qui
vise dans sa forme la plus aboutie, à ne plus :
- punir;
- corriger;
- exiger l'obéissance dans un rapport de force jugé néfaste.
Non,
le regard de l'adulte doit demeurer positif et
respecteux des enfants en toutes circonstances.
Autrement dit, faire preuve d'autorité est désormais
jugé comme un concept rétrograde, voire une forme de maltraitance.
Il
faudrait tout miser sur la confiance, la communication,
et bannir les ordres ou interdits. Mais n'est-il pas à
craindre alors, qu'une fois adultes, ces chers bambins
ne trouvent notre monde trop méchant et ne supportent
pas qu'un employeur n'ait pas un management
hyper-participatif? La vie doit-elle être nécessairement
ce bain de naphtaline dans lequel on voudrait les
plonger?
Vous
imaginez combien les parents IN CA PABLES
d'appliquer cette nouvelle doctrine peuvent aussi se
sentir incompétents et mauvais?
Mais que nenni, les défenseurs de
l'éducation positive entendront l'autorité comme un
rabaissement (maltaitance) qui en effet, serait
moralement contestable, et nous nous éverturions en vain
à leur dire que l'autorité n'a pour nous rien à voir
avec ça.
D'un extrême à l'autre
Alors faut-il militer pour le retour de l'école d'antant? Evidemment, ce retour semble impossible et n'est sans doute pas souhaitable. Il y avait en effet beaucoup d'abus et osons le dire, une forme de maltraitance qui pouvait à travers certains sévices, ne plus trouver de limites. Mais de là à tolérer ou à prôner l'école d'aujourd'hui où le parent est le premier à contester l'autorité de l'enseignant, n'y a-t-il pas un juste milieu à trouver?
La question fondamentale que je pose aujourdh'ui est la suivante : A quoi ressemblera demain une société où l'autorité parentale sera entièrement bannie et le savoir paupérisé, puisqu'avec l'absence de discipline, va aussi une débandade scolaire?
Effet contraire
Le discours de fond de cette
théorie prône pour moi un monde idéal où tous
les enfants seraient positivement éduqués. Un monde paradisiaque
où il n'existerait plus de rapports
dominés/domainants, mais un respect mutuel. Un monde en
paix.
Malheureusement, on peut craindre
au contraire que la conséquence de l'éducation positive
ne soit pas la création de ce monde céleste mais au
contraire, un monde où règnera le désordre.
Car que devient une société qui ne
castre plus ses enfants? Le principe cher à
S. Freud devenu obsolète, ne risque-t-on pas
d'aboutir à l'affrontement de toutes-puissances
individuelles qui ne concéderont plus le moindre effort
pour le collectif? Une société de personnes qui ne
veut plus de règles collectives, plus d'ordre, PLUS D'UNIFORMES
(habit
réglementaire que tous les membres d'un groupe
doivent porter selon des règles précises),
plus de hiérarchie, n'est-elle pas vouée à sombrer dans
le chaos ?
J'ai la conviction que des enfants à qui l'on n'a
justement pas voulu imposer un rapport de force et une
hiérarchie, ne deviendront pas les agneaux que l'on
espère, mais des monstres. Il serait souhaitable à mon
sens que l'homme, animal civilisé parmi tant d'autres
non civilisés, n'oublie pas que la nature à laquelle il
appartient s'organise avec une intelligence remarquable
dans un rapport dominant/dominé depuis des millénaires avant
notre ère, et même des millions d'années. Elle nous
démontre l'importance de cet ordre primoridial qui
fait que les plus jeunes qui ont besoin de
comprendre et d'apprendre pour transmettre à leur
tour les savoirs et coutumes de l'humanité, doivent
avant toute chose faire montre d'humilité et de
respect envers leurs aînés.
Auteur du livre : Ma vérité sur l'autisme, Jean-Luc ROBERT, N° ADELI : 779301076, consacre essentiellement sa carrière à l'étude et au traitement des troubles du comportement des enfants, notamment des autistes.