Clinophilie:
De la tendance à la pathologie
- Juin 2020
- par Jean-Luc ROBERT
- Psychologue à LezAPe
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Il se consumera, puis s'effondrera!
La
difficulté ou l'impossibilité de sortir de son lit peut
être soudaine et terrassante pour une personne qui la
veille, était pourtant très active. Qu'a-t-il pu se
passer durant la nuit pour que cette personne se
réveille différente? En cas de burn-out par exemple, il
peut y avoir un effondrement brutal qui fait que le
sujet passe de l'hyperactivité à l'apathie la plus
totale. Comme son nom l'indique, burn-out signifie
se consumer, brûler de l'intérieur. Alors qu'une
accumulation de stress agit insidieusement, le sujet
ignore que ce syndrome d'épuisement professionnel aura
raison de sa volonté dans quelques heures au moment où
il se réveillera. Il s'effondrera psychiquement,
entraînant le corps tout entier dans cet effondrement.
La nuit aura alors été comme un relâchement fatal.
Ne plus être en capacité de sortir de son lit sans pouvoir se l'expliquer, sera le symptôme très parlant de quelque chose de cassé en soi, comme un objet que l'on aurait sur-sollicité et qui serait logiquement immobilisé pour cause de panne.
Différentes manifestations
Ne pas
sortir de son lit peut aussi ressembler à une mauvaise
habitude, une sorte de flemmardise affichée, mais qui
masque en réalité l'installation pernicieuse d'une
dépression, ou même l'aggravation d'un trouble bien plus
grave comme la schizophrénie.
> Le
sujet souffre dans la dépression d'une perte de
l'élan vital qui peut en effet s'installer
progressivement et se manifester en premier lieu par la
recherche d'une position allongée et le prolongement de
cette position. Quelque part, lorsque le sujet prolonge
ainsi son temps onirique, il parvient à échapper à
une réalité stressante et désespérante qu'il est las
d'affronter durant son temps d'éveil. Il se réfugie donc
dans un sommeil protecteur qui lui permet de retarder
son retour dans le monde réel.
>
Concernant la schizophrénie, la clinophilie
s'inscrit dans un syndrome catatonique (dérèglement de
la sphère psychique et motrice) comprenant du
négativisme, c'est-à-dire une attitude de refus où le
sujet s'isole, reste allongé, prostré, refusant toute
sollicitation, l'agressivité pouvant même survenir si
l'on insiste trop.
> Autres
cas : Le comportement d'opposition des
jeunes sujets qui ne peuvent se montrer autonomes
pour le réveil doit aussi questionner. Il est
généralement acquis dans leur esprit que leurs parents
doivent faire office de réveil-matin, témoignant d'une
forme d'immaturité où ils vont jusqu'à se décharger de
l'obligation de se réveiller pour assumer leur journée.
Leurs parents s'y prennent souvent à 10 reprises, puis
sont obligés de les coacher pour qu'ils parviennent à
enchaîner les tâches qu'ils ont à faire jusqu'à leur
départ à l'école. Pour les pires cas, il arrive même que
ces jeunes souvent retardataires, refusent de se lever,
désespérant des parents lassés de faire le tampon entre
eux et l'école (ou autres institutions). Il faut
comprendre dans cette situation, que ce symptôme est la
résultante d'un "glissement" qui remonte à plusieurs
années, et qu'une simple colère ou punition ne pourra le
faire disparaître.
Un entourage déboussolé
Un.e
enfant, adolescent.e, ou jeune adulte, qui resterait "de
plus en plus" allongé.e dans son lit est donc un
signe qu'il ne faut pas sous estimer. S'il
persiste, il faut alors envisager de consulter un.e
psychologue ou un.e psychiatre. S'agit-il d'un mal
être passager? Y a-t-il un problème somatique
solutionnable qui leur permettrait de pousser un ouf de
soulagement? Différentes explications sont possibles,
mais les proches généralement trop angoissés par cette
manifestation préoccupante ont rarement le recul
nécessaire pour comprendre ce qui se passe.
Déboussolé,
cet entourage peine à dater le début du trouble tant il
s'est installé progressivement, et ignore souvent que
cette "mauvaise habitude" qui a viré à la paralysie,
n'est pas un signe isolé mais fait partie d'un ensemble
de signes. Car à bien y réfléchir en effet, on
s'aperçoit que le.la jeune en question parle moins, a
cessé telle ou telle activité, se sent triste, bref, va
mal. Et comme pour le burn-out, il faut considérer que
ce syndrome s'est formé et renforcé au fil des mois
voire des années, à bat bruit, alors que les
proches pensent en général que cette difficulté est
récente et déconnectée du passé. En psychologie,
rappelons nous que la majeure partie des troubles
manifestes prennent leur source dans des évènements
passés et répétés.
Auteur du livre : Ma vérité sur l'autisme, Jean-Luc ROBERT, N° ADELI : 779301076, consacre essentiellement sa carrière à l'étude et au traitement des troubles du comportement des enfants, notamment des autistes.