Le travail sur soi : Partie I
- Octobre 2018
- par Jean-Luc ROBERT
- Psychologue à LezAPe
L'expression "remettre",
prise dans le sens de "mettre de nouveau" en question
une personne, de faire naître un questionnement ou des
incertitudes à son sujet, laisse penser qu'elle a déjà
été mise en question une première fois. Mais il me
semble en réalité, que "remettre" est ici empoyé dans le
sens de : "renouveau" ou de "révolution". On pourrait
ainsi dire à quelqu'un : "Rends nouvelle, renouvelle,
révolutionne, fais donc évoluer, ta manière de voir les
choses à ton sujet". "Re" comme "Revoir", "Refaire",
"Recommencer". Ce préfixe donne un certain poids au
verbe d'action "mettre". Il s'agirait ici d'annuler la
certitude d'une première analyse (ou mise en question),
de la Revoir entièrement. Il y aurait une mauvaise
lecture à corriger, dupés que nous aurions été par notre
subjectivité. Mais la subjectivité est bien le caractère
de ce qui appartient au sujet, à l'individu seul, et
c'est justement là que se trouve la difficulté. Demander
à un sujet de se déposséder d'une partie de lui-même,
voire de se refondre entièrement, c'est lui demander
d'accepter une perte de repères totale.
Je dirais grossièrement que pour renaître, il faut
d'abord mourir un peu. Il y a donc l'idée d'un
renoncement déprimant, à ce que survive cet amour total
de soi, qui nous semble si vital. L'ego, notre fondation
majeure, la représentation la plus fidèle de la
conscience que nous avons de nous-même, se trouve alors
en grave danger. Il érige logiquement ses défenses pour
survivre et refuser l'anéantissement.
Lors du travail sur soi, la capacité à se remettre en
question est, à n'en pas douter, déterminante pour que
le sujet trouve une issue favorable aux difficultés
qu'il connaît. Cette capacité varie énormément d'un
sujet à l'autre. Rares sont les personnes pour
lesquelles cet exercice est facile. Dit autrement, on
peut donc affirmer que la norme (pour une majorité de
sujets) en la matière, est qu'il soit difficile de se
remettre en question.
Mais pour quelles raisons la remise en question est-il si difficile?
Comme nous l'avons dit, la remise
en question toutche aux fondements mêmes du moi, ce qui
entraîne de facto l'activation de défenses afin de
lutter contre une certaine vulnérabilité. L'ego est une
machine programmée pour ériger les défenses-réflexes
dont nous parlons. Pour prendre une analogie simple,
c'est un peu comme si l'on essayait de désactiver
artificiellement le système immunitaire de l'organisme
humain visant à se défendre contre les agressions
extérieures (maladies), en pensant que celui-ci se
laisserait docilement faire. Il est certain que cette
machine autonome et programmée pour la survie,
essaierait par tous les moyens d'empêcher la
désactivation de son système antivirus.
En psychologie, le psychisme du sujet lui échappe
partiellement. Une forme d'automaticité lui permet,
lorsqu'il y a une menace d'anéantissement, de se mettre
en mode : "auto-protection". Le sujet conscient peut
alors se trouver en lutte contre le sujet inconscient
qui a activé son système de défense.
La remise en question : Le chaos!
Voilà pourquoi il ne suffit pas de
dire à un sujet ce qui ne va pas chez lui pour que ce
dernier soit en mesure de se "remettre en question" et
de changer d'attitude. Lui dire ce qui ne va pas de bute
en blanc, entraîne quasi-systématiquement un conflit
interne et l'activation et/ou le renforcement de ce
processus défensif, comme l'a si bien expliqué A. Freud
[1] (Ce qui ne signifie pas à mon sens qu'un thérapeute
ne doit jamais adopter cette posture en connaissance de
cause). Il s'agira en psychanalyse, d'aider le sujet à
"prendre conscience de..." Mais alors, que le chemin
sera long et chaotique. Le sujet fera un pas en avant,
puis trois en arrière, la peur de l'anéantissement de
son moi le contraignant à rétropédaler, voire à ne plus
venir nous consulter. C'est trop douloureux, trop risqué
d'aller fouiller là-dedans. Parmi les défenses, la
remise en question du psy sera fréquente. Finalement,
avant tout ce remu ménage, on n'allait pas si mal que
ça. On n'était certes pas heureux, mais on ne ressentait
pas ce poids pénible peser sur sa poitrine. C'est
d'ailleurs bien à cela que sert l'inconscient non ? Etre
tranquille?
On peut alors se demander la chose suivante :
COMMENT SE FAIT-IL QUE CERTAINS SUJETS PARVIENNENT
DAVANTAGE À SE REMETTRE EN QUESTION QUE D'AUTRES ?
Je vous laisserai, fidèles lecteurs.trices, répondre
à cette question via la rubrique "commentaires".
Je me ferai un plaisir de vous lire, puis de vous citer
dans le prochain article : "LA REMISE EN
QUESTION. Le travail sur soi - Partie 2."
Alors à vos plumes, prêts...
[1] FREUD A. (1936). Le moi et les mécanismes de défense. Paris, PUF, 1996.
Auteur du livre : Ma vérité sur l'autisme, Jean-Luc ROBERT, N° ADELI : 779301076, consacre essentiellement sa carrière à l'étude et au traitement des troubles du comportement des enfants, notamment des autistes.